Dès les années 90, le conseil général a encouragé l'organisation des territoires cantonaux par le développement des comités de territoire. Moulins-Engilbert, Fours et Luzy formèrent le comité de territoire du Sud-Morvan avant que Fours ne se tourne vers le pays Nevers–sud Nivernais et que Luzy n’organise son propre EPCI, la communauté de communes entre l’Alène et la Roche. En l'absence toutefois de Semelay, alors que Chiddes, qui n'appartenait pas au comité de territoire, adhère à la communauté de communes. Moulins-Engilbert ne parvient pas à structurer son canton en raison de la forte opposition de Saint-Honoré-les-Bains, qui n'appartenait pas au comité de territoire, pas plus qu'Isenay.
Sur le canton, seules Moulins-engilbert, Maux, Préporché, Villapourçon ont délibéré favorablement sur l'intercommunalité. Les autres communes n'ont même pas délibéré.
Les entretiens sur le terrain ont montré que cet échec a plusieurs causes :
D'abord les oppositions d'analyse liées a des situations différentes. Moulins-Engilbert, chef-lieu dynamique, mais vieillissant, a beaucoup à gagner d'un renforcement de son pouvoir sur un canton qu'il domine assez largement si l'on excepte Isenay et Montaron attirés vers l'aire de chalandise de Cercy-la-Tour (voire de Decize). Reste Saint-Honoré-les-Bains, qui, grâce au casino du groupe Partouche, et à sa réputation de station thermale (malgré des difficultés), lui tient la dragée haute : ouverture d'un multiservice, piscine couverte et bassin d'été découvert, cinéma, hausse des effectifs du primaire, augmentation du nombre des agents communaux, nombreuses réalisations et projets de valorisation du bourg (dont une opération coeur de village). En outre, le solde migratoire est positif, alors que le solde naturel apparaît moins dégradé que celui de Moulins-Engilbert. Pourquoi partager ses ressources avec le chef-lieu de canton alors que la commune se débrouille très bien toute seule ?
b) L'opposition résolue – et argumentée – de Madame le Maire de Saint Honoré à toute forme d'intercommunalité de type EPCI, vécue par ses administrés comme une intolérable mise en tutelle de la commune. Opposition d'autant plus résolue, qu'on a voulu lui forcer la main : pressions préfectorales, cantonales, etc…
En outre, sa position de conseillère régionale UMP (qu'elle conserve malgré la défaite, passant dans l'opposition) lui donne une capacité de résistance que ne possèdent pas nécessairement les maires ruraux "de base" !
Des oppositions de personnes, renforcées par des oppositions politiques. Les tentatives et approches lancées par le conseiller général socialiste (ex maire de Moulins-Engilbert), Monsieur Lambert, ont été ressentie par Madame Rignault, conseillère régionale UMP, maire de Saint-Honoré-les-Bains, comme un moyen, pour le PS, de mettre la main sur sa commune et sur les ressources du casino… .
Les choses sont donc restées en l'état. Ce qui n'est pas forcément une mauvaise affaire selon le tour que prendra l'intercommunalité sous sa forme actuelle, effectivement paralysante pour les petites communes. D'autant que les rencontres de terrain, avec les élus, montrent les réticences (pour ne pas dire le rejet) de plus de 80 % des maires interrogés à l'égard des EPCI. Leurs critiques portent, par ordre d'importance :
Sur le fait que seule la commune centre profite de l'EPCI.
Sur la perte de liberté des communes, privées de leurs compétences.
Sur l'empilement des structures.
Sur les comparaisons -défavorables aux EPCI- avec les syndicats (SIVU et SIVOM) qui sont plébiscités.
En règle générale, leur adhésion, s'explique surtout par le sentiment qu'ils ont de ne pouvoir s'opposer à la constitution de l'EPCI, en particulier, face au changement des règles de calcul de la DGF (Dotation Globale de Fonctionnement) versée par l'Etat. ce que confirment les experts, notant que la part de la DGF-EPCI dépasse, peu à peu, celle de la DGF commune(s).
C'est-à-dire qu'on pourrait avoir des surprises, une fois la carotte financière disparue, en matière d'intercommunalité !!
Naturellement, les élus de la commune-centre ont généralement une vision plus positive de l'EPCI mais cela ne confirme-t-il pas la validité du rejet, ou de la méfiance, des petites communes ?
Source : Jean de Rohan-Chabot, Le paradigme du développement local, D.E.A., Univ. de Clermont-Ferrand, 2004