Hstoire de Moulins-Engilbert : chronologie des principaux faits et événements, des origines à la Révolution Française. - II. La Renaissance
La période, qu'on
allait appeler celle de la Renaissance, verra
effectivement quelques moments de répit pour la commune
fortifiée de Moulins-Engilbert. Cest ainsi que, pendant
plus de vingt (20) ans, la vie locale sera à peu près
calme et que cette tranquilité relative sera mise à
profit pour réparer, avec l'aval du comte Charles de
Nevers, les fortifications et tous les stigmates dûs aux
pillages et aux guerres. Précisons que Moulins-Engilbert
va rentrer, via le comté de Nevers, sous
l'administration royale de Louis XI. En 1463, les Etats de la Province du Nivernais se réunirent à Moulins-Engilbert pour fixer les termes de la coutume mais neuf (9) articles ne pourront être arrêtés. Cet échec relatif entraînera une autre réunion du même genre, en 1515, sans plus de succès. En 1534, la Coutume fut enfin votée et promulguée dans son entièreté. Entre temps, le duc Charles de Bourgogne, comte de Charolais, celui qu'on allait appeler "le Téméraire", cherchait à s'emparer du Nivernais. Il faut dire qu'il fut dès l'origine l'ennemi juré de Louis XI. Pour sa part, Moulins-Engilbert était défendue par sa milice bourgeoise qui venait d'être constituée. Et, en 1465, quatre cents (400) hommes du maréchal de Bourgogne, envoyé par le duc Charles, se heurtèrent au remparts de Moulins-Engilbert, sans pouvoir y entrer. Et, le 8 juillet, Louis XI, dûment averti, finit par les en chasser. Mais le duc de Bourgogne ne voulait pas rester sur cet échec. En juillet 1474, il revint à l'assaut et, cette fois, réussit à s'emparer de la ville. L'attaque eut lieu au midi, entre les portes Saint-Antoine et Notre-Dame. Louis XI reprit la ville assez rapidement, avec un petit corps de troupe et, en plus, s'empara de Château-Chinon, la Tournelle, Saint-Péreuse et Châtillon-en-Bazois. Mais le comte de Roussy, envoyé par Charles le Téméraire, reprit la seigneurie de Château-Chinon. Les choses commencèrent à devenir vraiment sérieuses lorsque le 13 mai 1475, Louis XI nomma le duc de Bourbonnais son lieutenant général aux fins de préparer militairement la "rencontre", celle qui aura lieu effectivement près de Sermages, entre Château-Chinon et Moulins-Engilbert, au lieu-dit appelé "les Champs de Guy" et que l'on appela plus tard, "Le Champs de la Bataille". C'était un certain 20 juin 1475. Ce fut un véritable carnage, deux-mille hommes tués de part et d'autre, autant de prisonniers, les bourguignons en déroute, rattrappés à Moulins-Engilbert, Saint-Péreuse et Châtillon-en-Bazois. Cet échec cuisant des bourguignons valut au comte de Roussy d'être fait prisonnier et d'être remis à Louis XI via son chambellan. Louis XI en personne ne se contentera... que de le sermoner. Pourquoi un traitement si "humain", si ce n'est que Louis XI avait une énorme dette envers les anglais et que Louis XI allait se servir du comte de Roussy pour les rembourser... en partie. Louis XI devait aux anglais 75.000 écus d'or, il en obtiendra 45.000 du comte de Roussy, qui sera ainsi libéré... En effet, le traité de Pécquigny prévoyait le paiement par Louis XI de cette somme aux anglais moyennant leur retrait de Paris. Plus tard, Louis XI viendra rendre visite à ses sujets de Moulins-Engilbert avant d'y tenir ses Etats dans la grande salle du château. Louis XI eut alors comme conseiller Guillaume de Biche, natif de Moulins-Engilbert, "homme de fort petit état" suivant Philippe de Comines (1447 - 1511, Sire d'Argenton et chroniqueur, conseiller de Louis XI après avoir été au service des ducs de Bourgogne). Guillaume de Biche intéressait Louis XI car, comme de Comines, il eut l'originalité d'être passé par la Cour de Bourgogne... Si Louis XI n'avait pas d'amis, car il n'en voulait pas, il savait s'entourer d'associés pour lui du meilleur profit. Un hiver
très rigoureux affecta les habitants de
Moulins-Engilbert en 1490, avec morts et famine. En 1509,
Moulins-Engilbert fut en partie détruite par un incendie
qui affecta également l'église et les remparts. Cet
incendie, qui restera à jamais dans les annales de la
ville, a sans doute été provoqué accidentellement car
on ne signale aucun pillage organisé à ce moment-là,
si ce n'est celui consécutif à ce même incendie. Le
comte de Nevers fut appelé par les habitants de la ville
pour négocier sa reconstruction. Et, le 14 juillet 1514,
une taxe fut due sur la vente des vins en vu de financer
cette reconstruction et c'est à cette époque que furent
développés les vignobles de Champmartin, vers le Bois
de Chaume. Ceux-ci devaient disparaître à tout
jamais... en 1878, en partie suite aux attaques du
phylloxéra, le vignoble ayant déjà dû subir deux ans
auparavant d'importantes gelées. Et, en 1523, le 28
octobre, Marie d'Albret, comtesse douairière de Nevers,
mère d'Henri IV, visita Moulins-Engilbert déjà bien
reconstruite. Elle fut reçut par noble Etienne du
Pontot, alors capitaine-gouverneur de la ville (le manoir
du Pontot existe toujours sous son ancien nom, à la
sortie du faubourg Rollin). En 1525, François Ier est fait prisonnier par les Impériaux devant la ville de Pavie (actuellement en Italie). Et il se passa ce qui se passa après d'autres défaites ou fins d'hostilités, à savoir que cette défaite "libéra" par inoccupation quantités de mercenaires qui ne trouvèrent pas mieux, comme naguère les "hommes de compagnie", comme les "écorcheurs", que de procéder à des saccages sur leur lieux de passage. Ceux-là étaient presque tous italiens, à la soldes de François Ier. Le 12 mai de cette année, ils s'attaquèrent à la ville de Decize, qu'ils trouvèrent fermée, sous la conduite d'un certain Louis de Bellejoyeuse, envoyé par la duchesse d'Angoulême combattre les hérétiques en Picardie. Remontant vers le nord, ils passèrent près de Moulins-Engilbert où ils détruisirent le château de la Montagne qui était en ce temps-là construit sur l'actuelle Vieille Montagne. Et à Moulins-Engilbert même, ils détruisirent vraisemblablement le château des comtes de Nevers, qui fut assailli, saccagé et brûlé. Le
château ne fut jamais reconstruit, état qui fut validé
le 31 juillet 1626 par Richelieu qui prescrivit la
destruction de tous les forts qui ne se trouvaient pas
sur la frontière du royaume. En 1672, la conciergerie et
la charpente des trois tours furent néanmoins
réparées. Le reste tomba entre les mains longuement
destructives de dame nature. Jusqu'à ce que cette
longueur de destruction fût singulièrement abrégée en
1793 par les habitants de Moulins-Engilbert qui
s'emparèrent de ce qui restait de pierres, bois et
matériaux, pour construire ou restaurer leurs maisons.
Entre temps, le château avait été déclaré Bien
National par le nouveau gouvernement révolutionnaire. Les guerres de religions éclatèrent ici et là, véritables guerres civiles qui opposèrent les sujets d'un même royaume suivant leur appartenance au protestantisme ou au catholicisme. En 1532, des dissensions éclatèrent, entre autres cités, à Moulins-Engilbert, Clamecy, Varzy, Prémery, Luzy, Corbigny... Et le 6 juin de cette année, la compagnie du seigneur de Saint-André, ordonné par François Ier, tint garnison à Moulins-Engilbert. Le 29 janvier 1563, les protestants s'emparèrent de Corbigny et les églises et monastères y furent brûlés. En 1568, Moulins-Engilbert et environ, Anizy en particulier, furent occupés par les troupes royales. En 1570, François de Bricquemaut, du parti des huguenots (les protestants), traversa les communes de Sémelay, Chiddes, Millay, Larochemillay, Saint-Jean Goux (actuellement orthographié Saint-Gengoult) et Villapourçon et brûle les églises de ces trois derniers hameaux. Les princes de Navarre, de Condé, de Nassaut, etc, du parti des huguenots, passèrent par le Beuvray et détruisirent le couvent des Cordeliers qui y était établi. Le 18 juin, le maréchal de Cossé, venant du Berry, traverse la Loire à Decize, passa par Moulins-Engilbert pour gagner Autun et installer son camp à Arnay-le-Duc le 25 juin, ce pour en découdre avec les hommes de Coligny, venu des Cévennes. Coligny et Cossé se battront effectivement. Coligny battit en retraite vers la Charité et passa par Moulins-Engilbert. S'il n'y eut pas d'exactions patentes à Moulins-Engilbert même, ses troupes ruinèrent les églises et prieurés de Commagny, la chapelle Notre-Dame de James, l'abbaye de Belleveau, les églises de Préporché, de Saint-Honoré et de Vandenesse. Les 23 et 24 août 1572, c'est l'apothéose de l'horreur avec 15.468 français égorgés par leurs propres concitoyens. L'arrivée au trône d'Henri IV en 1589, de confession protestante, sera immédiatement contestée par les catholiques qui ne reconnurent pas son autorité. Alors que les autres villes du Nivernais s'apprêtèrent à le combattre, Luzy et Moulins-Engilbert firent exception en se rangeant à son côté. Et c'est pour éviter une nouvelle guerre civile qu'Henri IV se convertit au catholicisme. L'attitude des habitants de Moulins-Engilbert leur valut de la part d'Henri IV le transfert, en 1590, du bailliage d'Autun dans leur ville, Autun qui en fut donc injustement privé. Henri IV mort par assassinat en 1610, il y eut quelques troubles avec des passages de troupes. Les échevins de Moulins-Engilbert commençaient à ne plus vraiment supporter de tels passages qui coûtaient cher à la communauté. Ainsi Jean Andrault, seigneur de Langeron et autres lieux, devait y rester huit (8) jours suivant les instructions de Richelieu, avant d'aller servir en Italie. Et Moulins-Engilbert n'avait pas été remboursée des précédents passages, comme ceux du comte de Bussy, de la cavalerie du seigneur du Tremblay, etc. La coutume était que les soldats fussent logés chez l'habitant, le plus souvent dans des maisons inoccupées ou abandonnées. Normalement, une indemnité était versée aux habitants qui y avaient consenti, si on avait de l'argent, ce qui était rarement le cas. Ainsi la famille Pougault-Lebreget se plaignit de ce fait à la Généralité de Moulins-en-Bourbonnais. En 1635, le monastère des Ursulines est construit en lieu et place de l'ancien Hôtel Dieu, et la chappelle sera ajoutée en 1715. En 1692, Louis XIV, arrivé au pouvoir en 1643, qui avait besoin d'argent, crée et vend des places de maires à vie et imagine en 1706 de rendre ces places triennales seulement. Deux ans plus tard, il veut toucher aux milices bourgeoises chargées de la sécurité des villes et des bourgs. Moulins-Engilbert, Decize, Château-Chinon, Saint-Saulge, Nevers, Saint-Pierre-le-Moûtier s'opposent par leurs maires et échevins à cette remise en question et... le roi s'inclinera devant cette opposition. En dehors de ces faits, la vie publique à Moulins-Engilbert s'était calmée. Des évènements climatiques, comme l'hiver 1708 - 1709, et accidentels, comme l'incendie du faubourg de James le 10 mars 1706, stoppé par le monastère des Picpus, seront catastrophiques pour les habitants : famine, disette, pillages... En 1773, un ouragan dévasta le hameau de James et le faubourg du même nom. Le 15 mai 1774, jour de foire de la Montagne, le faubourg de Bourgogne fut en partie brûlé. Tout un côté de la rue, qu'on allait appeler "Chaude", fut anéanti. Et le 6 juillet 1783, un tremblement de terre secoua la région, perceptible jusqu'à Villapourçon, qui ne fit heureusement pas de destruction. A la veille des événements révolutionnaires de 1789, on peut dire que Moulins-Engilbert eut à souffrir indirectement des nombreuses et longues guerres de Louis XIV, puis de celles de Louis XV auxquelles participa un certain Germain Louis Chauvelin, marquis de Grosbois, natif, semble-t-il, de Moulins-Engilbert, d'Amiens suivant d'autres biographes, bien que la famille fut bien de souche moulinoise. La natalité, assez élévée au début du 17ième siècle, baissait continuement du 17ième au début du 18ième siècle avant de reprendre dans la deuxième moitié de celui-ci. La région était assez prospère sous Louis XVI lorsque celui-ci, sentant la population changer et mûrir, convoqua les premiers Etats Généraux à l'appui des Cahiers de doléances et, bien qu'on en eut plus trace, Moulins-Engilbert eut les siens. Quant aux murailles de la ville, elles rendaient l'âme, les portes Saint-Antoine et du Guichet étaient en fort mauvais état, et la porte Saint-Antoine fut même en partie démolie dès 1770. Le 22 décembre 1789, dans le cadre d'une complète restructuration administrative, Moulins-Engilbert, qui jouissait d'un certain prestige, devint le chef-lieu d'un district composé des cantons de Moulins-Engilbert, Luzy, Châtillon en Bazois, Montigny-sur-Canne et Larochemillay. Le gabelage fut supprimé, le Grenier à Sel vendu. La châtellenie disparut avec le bailliage et un tribunal civil allait y être installé dès 1800. Moulins-Engilbert, qui participa loyalement aux évènements révolutionnaires, changera provisoirement de nom pour s'appeler Moulins-la-République. La commune de Moulins-la-République était toute petite, pratiquement réduite à la disposition des remparts. Presque tous les faubourgs, de La Brosse à la rive droite du Garat, une partie de la rue de James et de la rue Coulon, appartenaient à la commune de Commagny qui ne tarda donc pas à être absorbée, dès l'An II, par celle de Moulins-Engilbert. Le district fut dissout le 24 brumaire An IV, les anciens cantons dissouts et restructurés en 1800, date à partir de laquelle Moulins-Engilbert, qui a perdu dans sa rivalité avec Château-Chinon, confirmée dès 1815 comme sous-préfecture, en sera le chef-lieu définitif. Une bonne partie de la noblesse locale, comme les du Crest, du château de Vilaine, les de Cleroy, du château du Mary et les de Ganay, du manoir du Pavillon, avait fui, indexée sur la liste des Emigrés, et un certain nombre de manoirs et châteaux de la commune vendus à l'Etat ou, si non repris, abandonnés : le château du Pavillon en fut la seule exception. Le monastère de Moulins-Engilbert, vendu à l'Etat dès 1790, fut vidé de ses religieuses dès 1792 et servira de tribunal, de gendarmerie, d'armurerie, de centre admnistratif, d'école, etc. Sur le plan économique, Moulins-Engilbert disposait de nombreuses activités artisanales et industrielles par des moulins (il y en avaient sept), des tanneries, taillanderies, foulons, tuileries (il y en a eu jusqu'à douze) et poteries. Dans ses nouvelles frontières communales, qui avaient absorbé celles de Sermages et de Commagny, Moulins-Engilbert comptait déjà près de 2.800 habitants. * * Le 19ième siècle qui suivit, à la démographie galopante, sera assurément celui des occasions manquées : canaux et chemins de fer à voie normale ne passeront pas à Moulins-Engilbert. Le tribunal civil, dont les cellules ne donnaient pas satisfaction, fut à terme transféré à Château-Chinon dès 1810. Les petites industries traditionnelles périclitèrent les unes après les autres, incapables de se moderniser ou de suivre l'évolution de l'économie et de la technologie. L'agriculture subit crise sur crise, ce dès 1823. Libérée de ses remparts dès 1840, restructurée dans ses rues et accès entre 1830 et 1890, dotée d'une commune assez étendue, Moulins-Engilbert, à l'écart des grands axes, pourtant bien reliée à eux dès 1832 par les nouvelles routes, n'a sans doute pas eu - ou voulu avoir - les moyens de son développement. Ce 19ième siècle, qui a vu à la fois sur Moulins-Engilbert la construction du Champ de Foire en 1857 et l'extinction progressive de la bourgeoisie terrienne, consacrera largement la perte d'influence économique et politique de la commune cantonale dans la région avec, dès 1860, à l'instigation de la famille Viel de Lunas d'Espeuille, la montée en puissance du thermalisme de Saint-Honoré et, dès 1886, le début de l'exode rural à la faveur des grands centres industriels du val de Loire. Moulins-Engilbert avait alors, séparée de Sermages à partir de 1841, culminé à 3.554 habitants. En 1908, un chemin de fer à voie métrique arrive enfin à Moulins-Engilbert, dont la construction est liée à l'activité traditionnelle des foires aux bestiaux de la ville. Il fonctionnera jusqu'en 1933. Sources : Victor Gueneau, 1900, Victor Moreau, 1904, Albert Rabion, 1910, Ernest Renault, 1953, Gabriel Vannereau, 1962, Violette Desbois, 1973, Pierre Péré, 1990. |