Marie Eugénie était née à Beaune d'une famille d'origine champenoise, un certain 16 mai 1816, de Jean Baptiste Isaac Verry (ca1780 - 1848), marié le 1ier septembre 1806 à la Chaleur (Côte d’Or). avec Jeanne Elisabeth Rameau (? - 1820), lui-même fils de Christophe qui, natif de Beaune, épousa à Langres, le 2 octobre 1775, la nivernaise Marie Madeleine Etiennette Goguelat. Marie Eugénie, seconde de la fratrie, avait trois frères, Denis (Guillaume Eugène) (1818 - ?), Jules (Etienne Henri) (1812 - 1872) et Louis (Xavier) (1820 - 1870), ces deux derniers dont nous reparlerons.

Famille d'origine champenoise, les Verry et alliés faisaient partie de la même loge maçonnique. Tous les actes signés portent la preuve de cette appartenance. Il en sera de même avec Alexis Chanson, successeur des Verry, dont nous reparlerons, qui fut dès 1843 Vénérable en titre en remplacement du docteur Lataud, alors âgé de près de quatre-vingts (80) ans, Vénérable honoraire. La loge de Beaune s'appelait "Les Amis de la Nature et de l'Humanité".

Son père, Jean-Baptiste Verry Rameau - ainsi nommé -, négociant en vin à Beaune, venait d'acquérir, en 1834, le château et les terres du comte de Mandelot, alias Henri Camille Bataille, au lieu-dit de Bouze, commune circonvoisine de Savigny, dont il fut longtemps le maire, qui seront repris et remaniés à grands frais par son fils Jules, frère de Marie Eugénie, douze ans plus tard, notamment pour l'élevage des chevaux de course. Cette activité, qui masquait en fait une incapacité à gérer l'entreprise de son père, devait introduire Jules Verry dans les Jockey-Clubs de Paris. Traumatisé par la perte de son frère Louis durant la guerre de 1870, Il devait, suite à un pari perdant, se suicider à Paris, en son domicile du 8ième arrondissement, un certain 18 décembre 1872.

Son arrière-grand-père, Simon Verry, s'était marié deux fois, en 1715 avec Anne Duvoisin, mariage sans descendance connue à ce jour, et en 1736 avec Marguerite Chapusot, qui eut, entre autres enfants, Christophe. Simon Verry, gentilhomme ambitieux, marchand de son état, provenait de la région de Langres, son berceau familial, dans l'actuelle Haute-Marne, et avait fondé à Beaune, en 1750, sous Louis XV, la Maison qui longtemps porta son nom - la Maison Verry, qui s'appelle de nos jours la Maison Chanson. Cette Maison appartenait à la première génération de la Maison de Commerce de Bourgogne : avec Simon, elle commerçait déjà avec l'Angleterre via T. Merritt & Co ; avec Christophe, son fils, qui repris l'affaire dès 1775, elle commerçait dans les neuf années qui suivirent avec huit-cent cinquante (850) clients différents dans une centaine de villes à travers l'Allemagne et les Pays-Bas, la Suisse et l'italie, généralement des gentilshommes qui achetaient de petites quantités. Au Premier Empire, la Maison commerçait avec Georges Nicolas Joseph Libert, inspecteur général des Mines envoyé en 1808 à Liège : au moment des événements tragiques de 1815 (bataille de Waterloo), Jean-Baptiste y fut, avec deux autres négociants de Beaune, retenu prisonnier par les autorités militaires de cette ville. Son "siège social" se situait après la Révolution dans le site historique du bastion de l'Oratoire, ancienne tour de défense de la ville de Beaune mise en Bien National.

En fait, Simon Verry, venu de Champagne avec une tradition viti-vinicole, spécialisé à l'exportation, ne faisait pas du vin son commerce exclusif, puisqu'il y adjoignait du fromage, de l'huile d'olive, des bouchons de liège et du raisin en grappe. On a également appris, suivant une étude publiée aux Annales de Bourgogne en 2001, que la Maison Verry avait acheté en 1788 12 pièces (de 108 à 114 litres suivant les régions viticoles) et une feuillette (demi-pièce suivant l'ancienne unité de mesure pour les liquides). Ces achats témoignent déjà des moyens financiers de la Société et de sa prospérité.

La Maison Verry sera dirigée directement par la famille jusqu'à Jean-Baptiste, petit-fils de Simon, qui, malade, embauche dès 1844 son fondé de pouvoir en la personne d'Alexis Chanson, « commis négociant de Beaune » travaillant depuis longtemps dans la Société et ami de la famille, lequel fut très tôt témoin de la plupart des évènements familiaux des Verry. Jean-Baptiste Verry avait transformé l'ancien "boulevard des Filles" (boulevard de la Bussière) en vastes caves, suivant Pierre Joigneaux (Blondeau-Dejussieu, 1859 ), ancien représentant du peuple, député Montagnard et sénatuer de la Côte d'Or, "construction massive et peu élégante". En 1846, Jules Verry reprend l'affaire de son père Jean-Baptiste mais, en 1847, fortuné et préférant les chevaux au vin, il revend ses droits un an avant la mort de son père, à Alexis Chanson, qui confortera le Domaine de la Maison par l'acquisition de vignobles situés en premiers et grands crus de la Côte de Beaune et notamment le célèbre Clos des Fèves dont elle possède aujourd'hui le Monopole. Cela dit, la maison Verry, qui commença pourtant avec Jean-Marie Arouet [de Voltaire] et Lord Naisborough, ne connut pas sous la famille Chanson, comme ses paires de Beaune, une clientèle célèbre et son développement lui a parfois valu le terme d'"endormie". En 1999, reprise par la famille Bollinger, elle souhaite relever le défi de la nouvelle organisation du marché des vins dans le Monde et continuer à promouvoir la qualité des grands vins de Bourgogne sur les marchés internationaux.

Propriétaire d'un des meilleurs vignobles de la Côte de Beaune, (38 hectares situés exclusivement en premier et grands crus à Beaune, Pernand Vergelesses et Savigny), la Maison Chanson a, malgré quelques difficultés et dérapages récents, toujours eu en tête la qualité des vins de Bourgogne.

Par Marie Judith Verry (1783 - 1835), une soeur de Jean-Baptiste qui épousa un certain Louis (Joseph Xavier) Vuillier (1774 - 1836), l’un des fils de Simon Vuillier, propriétaire d'un vaste domaine à l'Abbaye-Damparis, négociant agricole, député du Jura à l'Assemblée Législative (1792 et 1793) et grand acquéreur de Biens Nationaux du Jura, une souche Verry s'est établie en Franche-Comté, à Dole (Jura), sous le patronyme de Vuillier-Verry puis avec le mariage de leur fille Judith (Henriette Augustine) de Chevalier-Gibaud. Cette lignée, qui s'est illustrée notamment dans la vie politique et judiciaire locale, est encore filiative. Louis Joseph Xavier appelé Vuillier Verry, beau-frère de Jean Baptiste Isaac Verry Rameau, fut Juge de paix des cantons de Dole, maire de Damparis de 1812 à 1830, membre du Collège électoral d'arrondissement en 1808 et Conseiller général du Jura, en 1831. Leur fille, Judith partie en Martinique en 1848 pour suivre l’exil contraint de son mari Albert Chevalier-Gibaud, procureur du Roi, reviendra en France à la mort de ce dernier de fièvre jaune pour s’installer à Beaune, près des siens.

Une autre lignée, provenant d'une autre soeur de Jean-Baptiste, Marie Antoinette Verry (1779 - 1859), celle dite des Vauchey-Verry, resta sur la place Beaunoise ; Guillaume (Denis) Vauchey (1768 - 1849), propriétaire à Beaune, avec qui Marie Antoinette s'était mariée, participa à la rédaction des Cahiers de Doléances du Tiers Etat beaunois, se présenta plusieurs fois à des mandats électifs au mayorat de Savigny-les-Beaune, après la Révolution ; puis, à partir de 1845, il fut membre du Conseil d'Arrondissement de Beaune (10 cantons et 202 communes), ce jusqu'à sa mort quatre ans plus tard, et sa répartie, publiée dans le Courrier de la Côte d'Or de juillet 1846, avec Eugène Lecomte, son opposant, demeura célèbre. Notable local, propriétaire de vignobles sur Savigny, Guillaume Vauchey Verry avait une fille, Joséphine Marie Judith dite Mélanie Vauchey, née en 1809 et décédée prématurément en 1836, qui se maria le 3 mai 1829 à Beaune avec un polytechnicien natif de Nuits-Saint-Georges (Côte d'Or), Louis Edmond Édouard Marey-Monge (1807 - 1863) qui rédigea en son temps un "traité d'aérostation" - sans descendance ; c'était le frère d'un général d'Empire, Guillaume Stanislas Marey-Monge (1796 - 1863), aîné le plus connu d'une fratrie de six (6) garçons et une fille issue de Nicolas Joseph Marey, ancien député de la Convention nationale, et de Charlotte Emilie Monge, fille de Gaspar Monge, comte de Péluse. Le deuxième patronyme a été accolé à Marey en 1840 du fait de cet ascendant célèbre et membre de l 'ancienne Académie des Sciences, un des fondateurs de l'Ecole Polytechnique, qui laissa son nom à une rue bien connue de DIjon. Plus modestement, Guillaume Vauchey-Verry laissa pour sa part son nom à la principale rue du centre-village de Savigny-lès-Beaune (orthographié actuellement Vauchey Véry), celle menant à la place Doumer.

Quant à l'orthographe du patronyme, il semble que l'habitude fût prise au milieu du dix-neuvième siècle d'écrire Véry au lieu de Verry, d'où une confusion avec d'autres lignées, notamment en Bourgogne et Franche-Comté. Ainsi en fut-il des Vuillier-Verry orthographiés Vuillier-Véry dans le Jura. Une rue de Beaune, qui donne sur le boulevard de la Bretonnière, parallèle à la rue Maufoux, tout comme la rue précédemment citée de Savigny-lès-Beaune, porte effectivement le nom orthographié de Louis Véry, pour Louis Verry (1820 - 1870), déjà cité. Un artiste peintre en avait fait son portrait, datant de la deuxième moitié du 19ième siècle, une huile sur toile d'Hoppolyte Michaud (1831 - 1886) conservée au musée des Beaux-Arts et musée Marey de Beaune. Ancien élève de l'Ecole Polytechnique, sorti officier de marine en 1841, il avait légué des terres à la ville de Beaune, d'où une rue à son nom ; il fut tué pendant la guerre de 1870. Le frère cadet de Marie-Eugénie fut le tout dernier de la fratrie puisque sa mère, Jeanne Elisabeth Rameau, devait mourrir quatre mois plus tard, un certain 28 décembre 1820.

Marie Eugénie, qui s'était mariée très jeune avec Charles Bonneau et eut avec lui trois enfants, devait s'éteindre à son tour un certain 16 août 1891 au château de Marry, sur la commune de Moulins-Engilbert dans la Nièvre, après avoir pratiquement perdu toute sa fratrie. Ne demeuraient plus que des parentées assez éloignées comme Henry Welter (1813 - 1897), qui fut maire de Beaune de 1848 à 1851, et Paul (Dominique Chevrey) Rameau (1836 - ?), fils d'un maire de Versailles, licencié en droit, diplomate et député de Seine-et-Oise.

Si le patronyme de Verry est à l'origine un endémique de Haute-Marne, il est également vu, sous cette même orthographe, en Bretagne et particulièrement en Maine-et-Loire.

Sources : Denis Perret, Burgundy to Champagne: The Wine Trade in Early Modern France De Thomas Edward Brennan, Geneanet 2007, Bien Public, 2002, Archives de la Haute-Marne, Archives de la Côte d'Or.

Remerciements : à Martine Fabre (Saint-Mandé) pour la lignée Vuillier Verry.